C'est au poil

Parfait de précision 
Il s'en est fallu d'un cheveu ou à un poil près sont des métaphores de distances infimes. 
Au poil a pris le sens de perfection, de précision, grâce aux pilotes de la guerre de 14-18, qui savaient atterrir au poil sur des terrains de fortune.


C'est la Bérézina !

Cette expression fait référence à la retraite de Russie et au passage de la rivière Bérézina, du 27 au 29 novembre 1812, consacrant l'erreur commise par Napoléon Ier de s'être attaqué à l'ours russe. Le tsar Alexandre n'observant pas le blocus continental, Napoléon conçut le projet insensé d'envahir et de conquérir la Russie avec une armée de plus de 600 000 hommes, composée, entre autres, d'un tiers de Français, d'un tiers d'Allemands et de plus d'une centaine de Polonais. Après la bataille de la Moskova, il marcha sur Moscou incendiée par les Russes et dut faire retraite devant la politique de la terre brûlée décidée par l'ennemi.
La retraite commença en octobre et se solda par une gigantesque catastrophe : 400 000 morts et 100 000 prisonniers. La fatigue, le froid, la faim et les cosaques eurent raison de la Grande Armée.
Toute la nuit du 25 novembre, à la lueur des torches, les soldats du Génie, les pontoniers du général Eblé, travaillant dans l'eau glacée, réussirent à construire deux ponts sur la Bérézina ; l'un pour les débris de ce qui fut la Grande Armée, l'autre, plus étroit, pour les canons, chariots et matériel. Le maréchal Oudinot passa le premier avec la Garde impériale.
Napoléon traversa à son tour, rentrant à Paris en toute hâte pour enrôler des troupes fraîches. Les uns après les autres, des milliers d'hommes se concentrèrent vers ces deux derniers espoirs de fuir les poursuivants. Ney, en arrière-garde, tentait de contenir les cosaques, pendant que Victor, avec 9000 hommes aidés de la région polonaise de Dabrowski, faisait face à 40 000 soldats ennemis sur la rive russe. Le 29, Eblé donna l'ordre de détruire les deux ponts, derniers espoirs pour des milliers de traînards qui finirent gelés ou noyés dans cette rivière tristement célèbre. 25 000 morts en trois jours, voilà ce que fut la Bérézina.

Ça tombe comme à Gravelotte

Ces mots sont généralement utilisés, au temps présent, pour parler d'une pluie forte et drue. Au temps passé, l'expression désigne, lors d'un combat, l'importance des pertes en vies humaines. Lorsque les 7 et 8 février 1807, Napoléon Ier remporta contre les Russes et les Prussiens la célèbre mais oh ! combien sanglante victoire d'Eylau, il déclara en substance que si les rois pouvaient voir un tel carnage, il seraient à jamais dégoûtés de faire la guerre.
Napoléon III aurait pu se remémorer les mots de son ancêtre, au terme de la bataille de Gravelotte-Rezonville, le 16 août 1870, au sud-ouest de la ville de Metz.
L'armée du Rhin, sous les ordres du maréchal Bazaine, opposée à l'armée prussienne d'août à octobre 1870, dut se replier sur Metz sans essayer de faire la jonction avec l'armée de Châlons commandée par Mac-Mahon ; ce qui sera reproché au maréchal.
Pourtant ce dernier s'était maintes fois illustré dès la guerre de Crimée, à la prise de Sébastopol ; puis pendant la campagne d'Italie, à Solférino en 1859. La capitulation de Metz après quelques semaines de siège, le 27 octobre 1870, mit un terme à une effroyable boucherie qui avait commencé à Gravelotte-Rezonville le 16 août. Les rangs ennemis se trouvant sans cesse renforcés, le combat ne finit qu'avec le jour. L'armée française était parvenue à maintenir ses positions, mais à quel prix ! Les pertes étaient énormes.


Ce n'est pas un foudre de guerre

Il ne fait pas d'étincelles 
Par analogie avec la puissance de l'éclair, le mot foudre au masculin s'employait au XVIe siècle pour qualifier le grand capitaine, le guerrier de génie que tous craignaient comme la foudre. 
L'expression ne s'emploie plus qu'ironiquement.


Coincer la bulle

Comme un artilleur 
L'expression est née chez les militaires. La bulle en question est celle du niveau qui sert à régler à l'horizontale la plaque du mortier. Une fois cette bulle coincée, les artilleurs peuvent se tourner les pouces en attendant l'ordre de tir, ils peuvent buller tant qu'ils veulent. 
C'est à ce même argot de Saint-Cyr que nous devons le surnom de bahut donné par les lycéens à leur établissement.


De but en blanc

Tir de but à but 
Les premières armes à feu ne comportaient pas de hausse mobile. La ligne de mire faisait un angle de quelques degrés avec l'axe du canon. Cet angle de tir était calculé pour qu'en visant le blanc, c'est-à-dire la cible peinte en blanc, le projectile l'atteigne. À la condition expresse de se trouver à la distance normale de tir. C'est ce que l'on appelait le tir de but en blanc. C'était le plus rapide. À une autre distance, il fallait viser au-dessus ou en dessous du blanc, ce qui demandait des réglages fastidieux.
Mais pourquoi tirer du but et non vers le but ? Parce que les premiers champs de tir comportaient deux buttes ou buts (en ce temps-là, les gens disaient aussi bien une butte qu'un but). Elles étaient séparées de mille pas, la distance normale pour les arquebuses dites buttières.
On tirait de l'une vers l'autre avant d'aller aux résultats. Puis de l'autre vers l'une. D'où ce curieux renversement de sens : d'endroit d'où l'on tirait, le but est devenu l'endroit visé.