La guerre en dentelles

La guerre telle qu'on l'imagine au XVIIe siècle, avec des manières raffinées 
Expression issue d'une vision artificielle et superficielle de l'histoire.

Lance-patates

Lance-roquettes 
Gare aux patates, plus difficiles à digérer que les pruneaux (les balles).

Les délices de Capoue

Il n'est point conseillé de succomber aux délices de Capoue, car grand est le risque de se laisser aller, de s'amollir, d'oublier la réalité, en un mot, de se voiler les contraintes de l'existence, les vicissitudes de la vie.
La ville de Capoue, fondée cinquante ans avant Rome, fut fatale aux troupes carthaginoises d'Hannibal en 215 avant J.-C. Pourtant l'Africain avait défait les légions romaines à Cannes, après avoir taillé en pièces 80 000 légionnaires qui restèrent sur un champ de sang.
Après cette victoire, l'un des plus célèbres de l'Antiquité, Capoue ouvrit grand ses portes aux vainqueurs, trop heureuse de pouvoir ainsi contrarier Rome, sa rivale, envers laquelle elle nourrissait une jalousie extrême.
Hannibal y prit donc ses quartiers d'hiver, succombant aux délices de cette ville, où ses troupes furent accueillies à bras ouverts. En fait, Capoue était la Babylone de l'Italie, ville de débauche et de corruption auxquelles ne surent résister les nouveaux vainqueurs.
À ce moment, si les Carthaginois avaient marché sur Rome, peut-être la Ville éternelle aurait-elle tremblé ; mais Hannibal préféra laisser ses troupes perdre l'avantage de la victoire, se laisser aller aux délices de Capoue et perdre leur combativité. Il y attendit ses renforts qui ne vinrent jamais. Une fois encore, Rome était sauvée.
Mais Capoue ne devait pas emporter cette trahison au paradis. Reprise par les Romains, la ville perdit tous ses privilèges. Les édiles et les responsables furent exécutés ou exilés.

Les habitants furent éparpillés comme si l'on voulait détruire le souvenir même de la ville. Pour remplacer la population, les Romains firent venir des colons étrangers. Rome craignit peu de choses au monde. Seule la honte l'effrayait et Capoue avait blessé son amour-propre.
C'est dans cette ville que Spartacus, en 73 avant J.-C., fomenta la révolte des esclaves, la dernière mais aussi la plus grave à laquelle Rome ait dû faire face. La ville actuelle de Capoue se trouve à cinq kilomètres de l'ancienne rivale de Rome, comme l'attestent les ruines encore visibles.


Monter sur ses grands chevaux

De bataille 
On a peine à imaginer que les percherons ou les boulonnais, ces chevaux lourds qu'on voyait paisiblement tirer la charrue ou le tombereau sur les chemins de campagne étaient les chevaux de bataille des chevaliers du Moyen Âge. 
Mais il n'est qu'à réfléchir au poids du cavalier, de son armure, de sa lance et de son épée, y ajouter le poids de la barde en lames de fer du cheval : entre trois et quatre cents kilos... 
Ce n'est pas un pur-sang arabe ou un chevau-léger qui pouvait conduire le chevalier à la bataille. Il fallait un grand cheval. Plus un en réserve, s'il était abattu sous lui, ce qui explique le pluriel.


Pas de quartier

Pas de rançon 
Prisonnier, un chevalier avait plus de valeur que mort : on pouvait en exiger une rançon. Les prix étaient variables en fonction de la renommée du captif. Jusqu'à l'an 1568, qui vit les Espagnols et les Hollandais se mettre d'accord pour fixer la rançon d'un officier au quart de sa solde annuelle, à payer par le capitaine propriétaire de son régiment comme on l'était alors. De là l'expression demander quartier
L'accord stipulait la possibilité de ne pas faire de quartier pour les simples soldats et de les exécuter.


Passer au tourniquet

Passer en conseil de discipline 
Du nom de l'ancien supplice dans lequel on brisait les membres du condamné, ce moderne tourniquet agite également le prévenu dans tous les sens.


Passer l'arme à gauche

Tout le monde connaît l'expression et comprend qu'elle remplace le trop brutal mourir. Son usage, attesté dès 1832, reste quelque peu familier, et trouverait son origine dans une image de l'escrime où passer l'arme à gauche correspond à désarmer son adversaire. Avant de l'achever ?!!
Une autre explication ferait remonter l'expression à la chevalerie, quand les hommes portaient l'arme sur le flanc gauche pour la tirer avec la main droite, et une fois l'homme mortellement blessé au combat, on faisait porter à son corps gisant l'arme sur le ventre pour signaler qu'elle était hors fourreau lors de la mort. Les chevaliers morts ailleurs qu'au combat gardaient l'arme sur le flanc gauche.


Passer sous les fourches caudines

En défilant à la sortie d'un... défilé 
Pour humilier les soldats vaincus, les Romains les obligeaient à défiler l'un après l'autre sous un joug en baissant la tête. Mais un joug n'est pas une fourche ! 
Les fourches caudines sont le nom d'une gorge montagneuse des Apennins dans laquelle l'armée romaine se fit prendre au piège par les Samnites en 321 avant J.-C. sans même combattre.


Point d'argent, point de Suisse

On n'a rien sans rien 
La locution qui existait déjà en 1640 est devenue proverbiale grâce à Racine et à ses Plaideurs
Le Suisse n'est pas là le portier d'église, mais le mercenaire. Il fallait que le capitaine, propriétaire de son régiment qu'il louait au roi comme c'était l'usage à l'époque, ouvre grand sa cassette pour enrôler ces redoutables mercenaires.


Pousser dans ses derniers retranchements

Une polémique (du grec polemos, guerre) est une bataille verbale où l'on essaie de pousser son adversaire dans ses derniers retranchements pour le voir succomber, à bout d'arguments.
À l'image de l'ennemi repoussé de tranchée en tranchée, à court de munitions.


Provoquer une levée de boucliers

Protestation de soldats 
Ce n'est pas pour se défendre que les légionnaires romains levaient leur bouclier, mais pour protester contre un ordre de leur général.

S'en moquer comme de colin-tampon

Comme des tambours de Marignan 
Marignan ? La réponse fuse : 1515. C'est la seule date de l'histoire de France que tous les Français connaissent car c'est une date aisée à se rappeler. Moins d'entre eux savent que la bataille de Marignan fut remportée par François Ier et que Marignan est en Italie. Et encore moins que cette victoire fut remportée sur les Suisses, alors alliés du duc de Milan. 
L'accent des soldats suisses, leur goût pour la bière au lieu du vin, leur gros ventre, attiraient les moqueries des soldats français qui les connaissaient bien car beaucoup de Suisses servaient dans les régiments français. Ils leur avaient collé le surnom de colin (diminutif péjoratif de Nicolas qui servait à désigner toute personne bête ou ridicule).
Tout au long de la bataille de Marignan, les soldats français s'en donnèrent à coeur joie. Ils raillaient complaisamment les batteries de tambour ennemies qui encourageaient vainement les troupes suisses au combat alors que leurs lignes étaient enfoncées par la fameuse furia francese.
De là date leur surnom de colin-tampon, tampon étant un autre nom du tambour.


Sans coup férir

Sans frapper 
L'étude des expressions apporte au linguiste la joie de retrouver des mots rares et précieux, aujourd'hui disparus de notre langue. Ainsi le verbe férir (du latin ferire). Vaincre sans coup férir, c'est gagner sans combattre, sans rencontrer la moindre difficulté. 
On retrouve également le verbe dans l'adjectif féru, blessé en ancien français, très épris aujourd'hui. Obligés de se rendre, tous les soldats des légions durent à leur tour défiler sous un joug fait de lances dressées érigé à la sortie du défilé. On comprend que ce peuple de conquérants en ait gardé un souvenir cuisant.


Sans désemparer

Sans abattre ses remparts 
Emparer une ville consistait à la munir de remparts (du latin emparare, se protéger par devant). 
Parvenu à s'emparer de la ville, l'ennemi s'empressait de la désemparer. Ils faisaient démanteler ses murailles, avant de l'abandonner. 
À partir du XVe siècle, époque où on a cessé de fortifier les villes, œuvrer sans désemparer prend son sens actuel : travailler d'arrache-pied, sans abandonner.



Se faire sauter le caisson

Ou la citrouille 
Expression de militaire qui se brûle la cervelle. Le caisson est bien évidemment ici le caisson à munitions. 
Les civils ont un vocabulaire bien plus varié pour désigner le crâne : caberlot, caboche, cafetière, caillou, calebasse, carafon, cassis, cerise, chou, ciboule, ciboulot, cigare, citron, citrouille, coloquinte... pour ne citer que des mots commençant par un c !


Tourner casaque

De mousquetaire, pas de jockey 
Nous devons la formule aux Italiens qui emploient dans le même sens voltare casacca. La casaque (du russe kosak) était l'uniforme à larges manches des militaires. Prendre casaque signifiait s'engager chez les Mousquetaires. 
Il faut se rappeler que les soldats de jadis étaient tous des mercenaires. À la fin de leur engagement, il leur arrivait de changer de camp, et donc de casaque. Parfois par régiments entiers ! Mieux, il était fréquent que le prince propriétaire de leur régiment le loue à l'un ou l'autre belligérant !


Traîneur de sabre

Surnom du militaire 
Dans quelques métiers où se côtoient civils et militaires, comme dans l'aviation, le vieux surnom de traîneur de sabre est resté, la désuétude de l'arme ajoutant à l'ironie du mot. Mais le militaire a de quoi riposter au civil, vil péquin qui ne connaît rien aux grandeurs de l'uniforme.


Travailler au noir - Faire du marché noir

Quand un robinet fuit ou une lampe se déglingue, on hésite à appeler un réparateur officiel dont l'auscultation vaut déjà une fortune et qui, s'il change un joint ou un cordonnet, vous entraîne dans des frais sérieux.
Les ouvriers qui travaillent au noir, enfreignant toutes les conventions collectives, semblent calquer l'appellation de leurs services sur le célèbre marché noir, celui qui fleurit dans l'ombre clandestine des années 40, et dont les échanges avaient parfois lieu dans des caves effectivement obscures. L'aspect illicite et plein de dangers de ces activités évoque en fond ténébreux la magie noire et les messes du même tonneau...
Or, si ces motivations souterraines ont sûrement participé au succès de ces expressions parentes, elles n'ont pas été suffisantes pour les créer !
Contrairement à l'idée reçue, le marché noir, aussi bien que le travail au noir existaient en France avant la guerre de 1939; il semble même que l'un ne dérive pas de l'autre, mais qu'ils aient tous deux empruntés à l'allemand dans les années qui suivirent la guerre précédente, années pendant lesquelles c'était le Français qui était l'occupant.
Le professeur J. Fourquet, en retraite à Fresnes, apporte les précisions suivantes : « En allemand, le terme de composition Schwarz (noir) entre dans des composés tels que : Schwarzarbeit, travail au noir 
Schwarzbrenner, bouilleur de cru clandestin 
Schwarzfahren, voyager sans billet 
Schwarzgeschäft, trafic clandestin 
Schwarzmarkpreis, prix de marché noir 
Scwarzschlachten, écouter la radio sans payer la taxe. Ce sens de scwharz a connu une diffusion particulière à l'époque des restrictions dues à la guerre de 1914-1918. 
Le Schwartzschlachten, abattage clandestion ou au noir de 14-18 avait amené la sérieuse administration prussienne à réagir : il y avait pour chaque cochon un bulletin de naissance, un passeport pour les déplacements, et un acte de décès !
Il est donc vraisemblable que le marché noir nous vienne de l'Allemagne de 1914-1918. » 
Ces suggestions sont corroborées par M. Léon Martineau de La Roche-sur-Yon : « L'expression marché noir était certainement connue dans des pays qui subissaient dès avant la guerre des restrictions alimentaires et de matières premières (l'Allemagne, par exemple). Le marché noir français ne devait apparaître que plusieurs mois après. » 
Sur le travail au noir, M. Martineau fournit également des renseignements très clairs : « Issu d'une famille d'artisans, j'ai soixante-cinq ans ; il me souvient d'avoir entendu déjà dans les années 30 les parents pester contre le travail noir ou le travail au noir. L'expression était d'ailleurs, dès cette époque, employée dans des documents officiels et dans des revues des chambres de commerce et de métiers » (lettre du 5 février 1981, à M. Claude Duneton).


Un marathon

New York organise chaque année le nec plus ultra des marathons pour les passionnés de course à pied. Ainsi en novembre, se rassemblent plusieurs milliers de coureurs sur 42,195 kilomètres : cette distance très précise est celle qui séparait la ville de Marathon de celle d'Athènes.
En 490 avant J.-C., Miltiade fut nommé général en chef de l'armée athénienne pour faire face à l'invasion des Perses de Darius. Bien que dépassés par le nombre, les Athéniens parvinrent à repousser les envahisseurs et à remporter un succès qui s'annonçait plus qu'incertain.
Darius vaincu, la Grèce était sauvée et la première guerre médique terminée. Miltiade envoya une estafette à Athènes pour annoncer la victoire. Le soldat couvrit la distance en courant le plus vite possible. Une fois son message délivré, il s'écroula, mort d'épuisement. Discipline reine des Jeux Olympiques, le marathon commémore ce lointain exploit.


Un vieux de la vieille

De la vieille garde 
Ce vétéran plein d'expérience est assimilé à un vieux grognard de la vieille garde impériale.


Une conversation à bâtons rompus

Comme un roulement de tambour 
Le terme vient des fanfares militaires : une batterie à bâtons rompus est un mode spécial de jouer du tambour où le roulement habituel des deux baguettes est remplacé par deux coups de suite donnés par chaque bâton. 
La langue classique a d'abord commencé par parler d'une tâche exécutée à bâtons rompus, à propos d'un travail sans cesse interrompu. 
On n'emploie plus le terme aujourd'hui que pour qualifier des propos décousus.


Une grosse légume

Une huile 
Vers les années 1830, les officiers supérieurs se virent attribuer le surnom assez surprenant de grosse légume (notez le féminin), à cause des graines d'épinard, comme étaient alors appelées les épaulettes des sous-lieutenants qui tous espéraient avoir un bâton de maréchal dans leur giberne.



Une huile

Une grosse légume 
Dans l'armée, les chefs portaient des bicornes et des galons alignés en grand nombre sur leurs manches, appelés des sardines. Par plaisanterie sur les boîtes de sardines à l'huile, les pioupious des années 1830 rangeront les gradés parmi les huiles, donnant naissance à l'expression aujourd'hui en voie de disparition nager parmi les huiles.


Une querelle d'Allemand

Une guerre de princes 
L'unité de l'Allemagne est toute récente. Elle date seulement de 1870, après la victoire de Bismarck sur Napoléon III à Sedan. Le traité de Westphalie en 1648 ne divisait-il pas le pays en 350 états ? Depuis la création en 962 du Saint-Empire romain germanique, guerres civiles et conflits entre princes n'avaient de cesse. Il n'est pas surprenant que l'expression querelle d'Allemagne, devenue querelle d'Allemand ait pris le sens de dispute sans raison valable. 
L'unité tardive de l'Allemagne transparaît au travers des noms multiples attribués à ses habitants : aleman en espagnol, ntedesco en italien, tysk en suédois, duits en néerlandais, germa en anglais. Sans compter les boches, les frisés ou les teutons en argot !
Pour leur part, les Russes appellent les Allemandes niemeic, les muets, ceux qui ne savent pas parler (sous-entendu en russe).


Yeux de chat

Sur un véhicule militaire, feux particuliers de faible luminosité permettant la conduite, et destinés à éviter le repérage par le guet ennemi. Il faut en patrouille ou à l'approche du combat, mettre ses yeux de chat.


À bride abattue

La bride est le « harnais placé à la tête du cheval et destiné à l'arrêter ou à le diriger, selon la volonté du conducteur ». Une façon de laisser à la bête l'entière liberté de ses mouvements est naturellement de lui laisser la bride sur le cou, symbole de parfaite non-directivité.
On peut aussi tourner bride : faire un demi-tour complet, et généralement détaler dans le sens inverse. Avant de pouvoir mettre l'accélérateur au plancher, les gens se déplaçaient à bride abattue, autre façon de laisser à la monture tout son élan et toute son impétuosité.
Ainsi c'est « sans réserve et sans retenue » qu'il faut comprendre dans ce mot de Mme de Sévigné : « Elle a un amant à bride abattue », et non pas une allusion à l'extrême rapidité de la chose.

On disait autrefois à bride avallée, c'est-à-dire au sens propre : « descendue ». Après leur débarquement en l'île d'Utopie, Pantagruel et ses compagnons voient « six cent soixante chevaliers montez à l'advantaige sur chevaulx légiers, qui accouroient là veoir quelle navire c'estoit de nouveau abordée au port, et couroient à bride avallée pour les prendre s'ils eussent peu ».



À tout crin

Comme un cheval ardent 
Symbolisée par Samson, prisonnier de Dalila, l'association force-chevelure-virilité existe aussi pour le cheval. L'étalon à tous crins (ou à tout crin, au singulier), celui qui n'a jamais eu la crinière ou la queue taillées est réputé être ardent. D'où le sens premier du terme : « avec énergie »
À tous crins a aussi le sens de « complètement ». Cet autre sens vient aussi du cheval qui, après avoir été étrillé a vu tous ses crins soigneusement brossés.


Entre chiens et loups


Entre chien et loup détermine une heure de la journée, du soir, plus précisément, quand rentrent les chiens (à la ferme), et sortent les loups (des bois).
L'heure est menaçante, dans la mesure où, la lumière ne permet plus de distinguer les silhouettes des animaux.


Pas de quoi fouetter un chat

Cette expression cruelle date du XVIIe siècle, et la mise en rapport des mots chat et fouetter en locution est ancienne : on disait à la même époque qu'une personne était « éveillée comme chat qu'on fouette ». 
Il est bien probable que ce fouetter n'est pas un innocent équivalent de battre, mais provient d'un à-peu-près avec foutre.

Une chatte n'y retrouverait pas ses petits

À propos d'un lieu en désordre, d'une chose, d'une histoire, d'une affaire embrouillée.

variante :
Une chienne n'y retrouverait pas ses petits




C'est reparti comme en 40 !

Tout le monde connaît le sens de l'expression, « n'attacher aucune importance à quelque chose », et longtemps on pensa qu'il s'agissait de l'an 40 de la Révolution, expression des royalistes après l'adoption du calendrier républicain : mais le régime ne dura pas jusque là. 
La découverte par Pierre Enckell d'un exemple datant de 1790 a ruiné cette explication. Aujourd'hui, on estime qu'il s'agit plutôt d'une déformation de « s'en moquer comme de l'Alcoran ». Le mot Coran ayant remplacé au XVIIIe siècle l'ancien Alcoran (al- qor‚n), l'expression n'aurait plus été comprise. 
En fait, il y a comme une crase (télescopage de deux expressions, deux tronçons de phrase), entre « s'en moquer comme de l'an 40 » et « c'est reparti comme en 40 », variation modernisée de « c'est reparti comme en 14 » allusion ironique à la Grande Guerre. Une expression qui supposerait que les combattants partaient le sourire aux lèvres et la fleur au fusil, pleins d'allant...



Nom d'un chien !

Au Moyen Âge, blasphémer était passible de châtiments corporels et nom d'un chien ! fait partie de la série des jurons euphémiques formés pour éviter le nom de Dieu, tout simplement.
... de chien ! (complément de nom) est toujours péjoratif, comme, par exemple, dans cette autre expression : un mal de chien.



Nom de nom !

Le tabou judéo-chrétien sur l'utilisation du mot « Dieu » a conduit à l'emploi de substituts : Tonnerre de Zeus ! Mon Dieu ! (sans intention injurieuse), Nom de Dieu ! (qui l'est plus). Les blasphémateurs anciens employaient des expressions fort cocasses qui ont dégénéré avec le temps pour changer quelquefois de sens : Par Dieu ! est devenu pardi ! ; Sacré Dieu ! sacrebleu ! ; Par la mort de Dieu ! morbleu ! 
On rejoint cette débauche d'imagination qui, au Québec, permet de sacrer sans sacrer tout en sacrant : Tabernouche, montadi, caltar, etc. 
Le roi Henri IV jurait beaucoup, prenant à l'occasion Dieu à partie. Fâché, il s'écriait souvent : « Jarni Dieu ! » (avec l'accent du temps, « Je renie Dieu ! »). Son confesseur, inquiet pour l'âme du Vert Galant (qui avait certainement bien d'autres peccadilles sur la conscience...), lui recommanda d'utiliser le même juron, mais en remplaçant le mot Dieu par son nom à lui, c'est-à-dire Coton. C'est ainsi que Jarnicoton devint un juron très à la mode pendant des siècles.



Sale coup pour la fanfare !

Pour les fanfarons
Un sale coup pour la fanfare est un brusque revirement de situation, par analogie avec la situation inconfortable du vantard, du fanfaron convaincu d'imposture. 
Au XVIIe siècle, faire grand bruit de ses exploits se disait faire la fanfare.


Tonnerre de Brest !


L'expression la plus célèbre du cher capitaine Haddock ne fait aucunement référence à quelque orage qui frapperait régulièrement le port breton... En fait, l'expression date du XVIIIe siècle, à l'époque où Brest avait un bagne. Chaque fois qu'un bagnard parvenait à s'échapper, l'alerte était donnée par le canon d'alarme du bagne que l'on surnommait le Tonnerre de Brest à cause du grondement que l'on pouvait entendre à des lieues à la ronde. Le bruit du canon était aussi le signal attendu par les innombrables bohémiens qui grouillaient aux alentours du bagne, appâtés par la récompense promise en cas de capture du fugitif. C'était donc une véritable meute qui se lançait aux trousses du prisonnier évadé.
Rares étaient ceux qui passaient entre les mailles du filet. La troisième tentative de François Vidocq fut la bonne. Il avait été condamné pour faux à huit ans de travaux forcés à Brest. En 1809, il fut décidé de créer une brigade de police composée d'anciens forçats dont Vidocq devint le chef. Il démissionna une vingtaine d'années plus tard pour se lancer dans les affaires. Son entreprise ayant fait faillite, Vidocq reprit du service dans la police en 1832. Chassez le naturel... Vidocq fut renvoyé pour vol. Balzac s'en inspira pour son personnage de Vautrin.
Entre les références à Tintin et à Balzac, voilà bien un juron qui a gagné ses galons d'idiome littéraire, non ?!!



Vingt dieux, la belle église !

Vain Dieu, la belle fille !
Accompagnée d'un sifflement d'admiration, cette exclamation est lancée habituellement au passage d'une jolie femme, parodiant un juron campagnard naïf. 
Vain Dieu (étymologiquement : Dieu est vide, chimérique) était considéré comme un juron blasphématoire. Sachant que faire retentir un blasphème pouvait jadis vous mener au bûcher, mieux valait le déguiser en vingt dieux et convertir la belle fille en belle église ; ce qui est cohérent avec le monde du sacré introduit par Vain Dieu.