À la queue leu leu

Quand on parle du loup, on en voit la queue 
Le mot leu n'est pas autre chose qu'une ancienne forme de loup. «Hareu, le leu ! le leu ! le leu !», criaient les bergers picards. Il a laissé des traces dans le nom de Saint-Leu, pour Saint-Loup, et naturellement dans la description de gens marchant l'un derrière l'autre - « queue à queue, comme les loups quand ils s'entre-suivent » : à la queue leu leu
Cela bien avant que les romans de Fenimore Cooper parlent de file indienne. Pourtant, le redoublement du mot leu n'est qu'une erreur d'écriture, déjà très ancienne.
Il constitue une mauvais (ou amusante) interprétation de la vieille langue où de et du ne s'employaient pas toujours pour désigner l'appartenance : Château-Gaillard veut dire le château de Gaillard et Choisy-le-Roi, Choisy du Roi. Ainsi la queue du loup était simplement la queue le loup, et en Picardie : la queue le leu, qu'on a finit par écrire leu leu.
Du reste, Rabelais cite la forme «à la queue au loup». Si l'expression a eu autant de vitalité, c'est qu'elle servait à désigner « un jeu de petits enfans », un jeu tout bête, et toujours amplement pratiqué dans les cours d'école maternelle, qui consiste à courir en rang d'oignons en tenant le tablier de celui qui précède...


Avaler des couleuvres

À la place des couleurs 
Il est facile pour un héron d'avaler des couleuvres. Les humains avalent mieux les couleurs. 
Dans le sens ancien du mot, couleur était une fausse apparence donnée à quelque chose. Avaler des couleurs n'étant plus compris, la logique populaire lui substitua des couleuvres, symboles de manœuvres tortueuses.


Avoir vu le loup

En réalité, juste la queue du loup 
Aussitôt le loup repéré, le curé faisait sonner le tocsin pour battre le rappel des hommes au champ. Tout le village se mettait en chasse conduit par ceux qui auparavant avaient déjà vu le loup. Ils étaient considérés comme les plus valeureux et les plus aguerris. L'expression ne s'appliquait alors qu'aux hommes.
S'il était renommé pour sa férocité, le loup l'était autant pour sa force virile. Faire la danse du loup ou danser le branle du loup était avoir des relations sexuelles. D'où le sens que prendra l'expression au XVIIIe siècle : une fille qui a vu le loup est celle qui a déjà l'expérience de l'amour... sans être passée toutefois devant monsieur le curé.


Bayer aux corneilles

Regarder les corbeaux voler 
Bayer aux corneilles a le sens de regarder les mouches voler. Il faudrait plutôt parler de corbeaux car la corneille est un petit corbeau. Mais c'est aussi le fruit du cornouiller. Alors ? L'origine de l'expression est-elle animale ou végétale ? Ni l'une ni l'autre, sans aucun doute... Car au XVIe siècle, corneille a également le sens de chose sans intérêt. Et c'est bien là le sens de l'expression. Reste à savoir pourquoi corneille a pris ce sens dépréciatif au figuré.
Est-ce dû à la saveur aigrelette de la cornouille qui en fait un fruit qui n'est guère plus apprécié que les nèfles (en Picardie, l'exclamation «des corgnolles !» a le même sens que «des nèfles !») ?
Ou bien ce sens figuré vient-il de la chasse au faucon ? «Voler pour corneille !» se disait du faucon stupide qui, à la place d'une grive ou d'une caille dodue, ramenait comme proie ce petit corbeau sec et immangeable ?



Comme c'est chouette !

La chouette n'est pas un animal anodin. Peut-être à cause de son air insolite et de ses mœurs nocturnes, sa réputation a beaucoup varié au cours des âges. 
Naguère oiseau de malheur dont le cri étrange (le chuintement) annonçait la mort de quelqu'un, elle était clouée sur les portes des granges - du temps qu'il y avait encore des granges et des portes de bois. Elle effraie aussi les rongeurs, ceci étant sans doute la raison pratique de cela). 
Chez les Grecs anciens, au contraire, elle était le symbole d'Athènes, parce que les chouettes paraît-il, abondaient dans la ville. En conséquence, elle fut dédiée à la déesse Athéna, Minerve, et à ce titre tout à fait respectée.
D'autre part, la chouette passe pour un oiseau coquet, soigné de sa personne. En ancien français, le verbe choeter signifiait faire le coquet et naturellement la coquette. On a donc parlé d'une femme chouette puis sans doute d'une chouette femme ! Panurge disait : « Ma femme sera jolye comme une belle petite chouette ».
Au jeu de paume - et l'on pourrait actualiser l'expression pour le tennis ou le ping-pong - on disait aussi faire la chouette pour jouer seul contre deux adversaires ; selon Littré parce que la chouette, si elle sort de jour, est assaillie et poursuivie par les autres oiseaux. Seul contre tous, c'est en effet assez chouette !
Quoi qu'il en soit, la fortune de ce mot dans le français d'aujourd'hui constitue une belle revanche pour un animal si longtemps et injustement persécuté.


Connu comme le loup blanc

Animal mythique 
Un loup rôdant dans les forêts alentour faisait souffler un vent de panique sur le village. On rentrait bêtes et enfants. La nouvelle se répandait comme une traînée de poudre. Elle était vite connue de tous. 
Être connu comme le loup, forme première de l'expression au XVIe siècle avait déjà le sens d'être notoire. 
Le XVIIIe siècle précisa la couleur de l'animal. Le loup blanc est une réalité un loup albinos : sa rareté avait fait de lui un animal mythique qui avait la réputation de toujours échapper aux chasseurs.


Des yeux de lynx

Il n'y a pas plus myope ! 
Lynx n'est ici qu'une déformation du nom de Lyncée, le pilote des Argonautes qui partirent avec Jason à la conquête de la Toison d'or. La légende grecque lui attribuait des yeux si perçants qu'il pouvait voir à travers les nuages et même au fond de la mer. 
L'animal a bénéficié de sa réputation, bien usurpée toutefois. Ce félin voit bien la nuit comme tous les chats, mais son œil comprend beaucoup moins de cônes que l'œil humain et il saisit moins les détails.
Sa vision de jour est surtout nette entre 2 et 6 mètres pour mieux attraper ses proies. En fait, il voit bien moins au loin que l'œil humain.


Faire le pied de grue

Pas du tout comme un échassier 
Attendre debout est pénible, à se dandiner d'un pied sur l'autre, en appuyant son pied derrière le genou de la jambe opposée ou sur le mur auquel on s'adosse. Exactement comme la grue qui se tient sur une patte. L'origine de l'expression semble donc évidente. Eh bien pas du tout !!! 
Si on se réfère à la forme première de l'expression qui était « faire de la grue », dérivée du verbe ancien gruer, attendre. Ce verbe était sorti d'usage, le langage populaire inventera au XVIIe siècle une locution imagée plus compréhensible. C'était l'époque où les hommes portaient des bas et des talons rouges et hauts. Par métaphore, le mot grue a pris très tôt, dès le XIVe siècle, le sens de poule, de prostitution, par allusion à la station debout prolongée des filles de joie qui attendent les clients au coin des rues.

Faire une queue de poisson

Faire une queue de poisson signifie, pour un véhicule, se rabattre brusquement devant celui qu'il vient de dépasser (1926). L'expression viendrait d'une métaphore sur le mouvement ondoyant du coup de queue d'un poisson.
À ne pas confondre avec « se finir en queue de poisson » : les deux expressions existent bel et bien avec deux champs sémantiques bien distincts.


Il y a anguille sous roche

Ça sent l'entourloupe 
« Latet anguis in herba » (Il se cache un serpent dans l'herbe) disaient les Romains. 
C'est un jeu de mots sur le mot ancien guille, entourloupe, qui a fait passer du serpent (anguis en latin) à l'anguille qui était un mets des plus recherchés au Moyen Âge. Ce poisson n'ayant aucune raison de se prélasser dans l'herbe, la logique populaire lui a substitué la roche. 
En anglais, cette anguille est devenue un rat : « I can smell a rat », je sens l'entourloupe.


Maigre comme un coucou

Dans le nord 
Comparaison surprenante car dans le Midi, on dit tout le contraire : «gras comme un coucou». On sait que maman coucou, n'aimant ni couver ni nourrir ses enfants, pond ses oeufs dans le nid d'un autre oiseau. 
Sorti de l'œuf, le jeune a le cou si maigre qu'il a donné naissance dans le Nord à «maigre comme un coucou», renforcé par l'expression voisine «maigre comme un clou». 
Mais comme le jeune coucou est beaucoup plus vorace et qu'il grossit plus vite que les autres oisillons aux dépens de qui il s'engraisse, les Méridionaux en ont retenu l'image inverse !


Malin comme un singe

Méchant comme une guenon 
Ce n'est que depuis Voltaire que l'expression a pris le sens d'astucieux, de futé. Auparavant, elle signifiait méchant comme un diable. 
Malin voulait dire autrefois méchant et le singe était aux yeux de tous un animal maléfique, la personnification du démon, du Malin.


Manger la grenouille

Il est tentant d'expliquer que grenouille est une tirelire en poterie qu'on brise pour s'approprier les économies contenues. Hélas pour l'hypothèse, les tirelires en forme de grenouille ne sont apparues que bien après la naissance de l'expression, en 1790. 
Il faut comprendre ici manger dans le sens de dépenser comme on croque un héritage. Et grenouille comme déverbal de grenouiller, ordinairement usité en ce temps dans le sens de ripailler, de dépenser son argent dans les cabarets.


Myope comme une taupe

Très myope 
Se dit par référence à la vue très basse de cet animal. 
On a dit « aveugle comme une taupe » (1642, Oudin), l'idée étant exprimée depuis l'ancien français : « taupe ne voit goutte », in Brunetto Latini.


Noir comme un geai

Faux... son plumage est bigarré ! 
À partir du jais, pierre dure de lignite, on faisait jadis des bijoux de deuil. On doit donc dire « noir comme du jais » et non « comme un geai ». 
Le geai appartient à la famille du corbeau cependant que son plumage n'est pas noir mais bigarré et terne, sauf quand il se pare des plumes du paon. 
L'homonymie est restée trompeuse pour beaucoup.


Noyer le poisson

Contradiction apparente 
L'expression semble absurde mais la contradiction n'est qu'apparente. 
Noyer le poisson est une technique de pêcheur à la ligne qui consiste à épuiser le poisson une fois ferré, en le sortant et en le replongeant dans l'eau de façon répétée.


On ne saurait faire d'une buse un épervier

On ne saurait faire d'un sot un habile homme 
Par allusion aux fauconniers qui dressaient bien l'épervier ou le faucon, mais ne pouvaient en faire autant du butor ou de la buse, qui passent pour stupides. 
Les Anglais disent : « you cannot make a silken purse out of a sow's ear » (on ne peut pas faire une bourse de soie avec l'oreille d'un cochon).


Ours mal léché

Enfant difforme
Aujourd'hui, personnage rustre, grossier et mal élevé, un ours mal léché était jadis un enfant mal venu. 
La tradition populaire voulait en effet que l'ourson naisse sous la forme d'une boule informe et que ce soit sa mère qui lui façonne le corps en le léchant longuement. 
Montaigne fait allusion à cette légende. On disait alors métaphoriquement lécher l'ours pour préparer minutieusement une affaire.


Peigner la girafe

Démêler trois mètres de longs crins sur le cou d'une girafe est un prototype de tâche inutile et fastidieuse. C'est un des deux sens de « Faire ça ou peigner la girafe ». Mais pourquoi le sens plus fréquent de ne rien faire ? L'explication tient peut-être à l'emploi de l'article défini : il ne s'agit pas de peigner une mais la girafe.
Certains font remonter l'expression à la première girafe connue en France. Don du pacha d'Egypte, l'animal fabuleux fit en 1827 une marche triomphale de Marseille à Paris qui dura près d'un an. Elle finit sa vie au Jardin des Plantes en 1845. Mais il faudra attendre 60 ans après sa mort pour que le terme apparaisse, ce qui laisse planer un doute sur cette hypothèse...
D'autres, moins pudiques, évoquent l'image du désoeuvré qui se masturbe. Ils la rapprochent d'expressions argotiques analogues du type de « s'astiquer le dard » ou de « se polir le chinois ».
En argot, le verbe de glander a effectivement le sens de ne rien faire et un branleur est un oisif paresseux.


Pousser des cris d'orfraie

Non, d'effraie 
Erreur commune : on devrait dire « pousser des cris d'effraie ». L'effraie est une variété de chouette qui pousse des cris sinistres propres à effrayer celui qui se perd la nuit en forêt. 
Il ne sert à rien de dire « pousser des cris d'orfraie », puisque l'orfraie est une variété d'aigle pêcheur dont le glapissement n'a rien de strident.


Se marrer comme une baleine

L'expression, qui signifie «rire en offrant une bouche béante » ne fait nullement référence aux sons produits par une baleine rigolarde : bruits perçants ou glauques n'ont rien de jubilatoire, et l'on parle assez souvent de la plainte des baleines. 
Il s'agit bien plutôt d'une image en rapport avec leur denture, toute faite de lames cornées garnies de franges, les fanons. Agissant comme un tamis, ces derniers filtrent l'eau qui s'engouffre dans la bouche de l'animal et retiennent poissons, krills et végétaux. Les baleines se meuvent fanons en avant, pour filtrer l'eau et ainsi se nourrir. 
« Se marrer comme une baleine » s'amuse à comparer un rire hilare, toutes dents dehors avec le rideau de fanons du gros mammifère.

Tête de linotte

Dans la psychologie animale populaire, les passereaux à petite tête, les linottes, les étourneaux et le grives, ont toujours été considérés comme sans cervelle. On disait au XVe siècle «quelle tête d'estornel !» (étourneau) pour qualifier l'étourdi qui avait encore oublié de faire quelque chose.
On pourrait croire que le mot étourdi vient de tour comme celui qui attrape le vertige après avoir trop tourné sur lui- même, mais non ! Étourdi signifie avoir le cerveau étourdi comme une grive (turdus en latin).
La grive se soûle de raisin, la linotte quant à elle se gave de linettes, graines de lin.


Un éléphant dans un magasin de porcelaine

Se dit d'un lourdaud qui parle ou traite sans délicatesse.


Un froid de canard

Si cette sympathique expression est connue de tous, son origine n'est pas si évidente que ça : pourquoi les canards seraient-ils froids ?
Bah en fait, il ne faut pas aller chercher bien loin : hors de la basse-cour, quand même, car un froid de canard est une expression de chasseurs, tout simplement ! Ainsi est désigné un temps propice à la chasse au canard sauvage, très froid, très vif.


Un peu de litté-RAT-ure !

Elles sont nombreuses, les expressions faisant appel à ce petit rongeur mal-aimé !
S'ennuyer comme un rat mort, crever comme un rat, sans parler des expressions métaphoriques telles rat de cour, rat d'opéra, rat de bibliothèque, rat d'hôtel, bref, ce mot aux origines obscures a fait carrière !
Mais sait-on que ce même nom serait à l'origine du verbe « rater » ou du substantif « ratage » ? Au début, ce terme signifiait que la chasse aux rats n'avait rien donné, que l'on en revenait bredouille, en ayant raté sa cible...


Verser des larmes de crocodile

Les sirènes du Nil ? 
Vieille légende grecque et latine : les Anciens prétendaient que les crocodiles sacrés du Nil attiraient leurs victimes par leurs pleurs et leurs gémissements, à l'image des sirènes attirant les marins. 
On dit encore que le crocodile pleure, vagit ou se lamente quand il pousse son cri.


Avoir quartier libre

Le mot quartier avait chez les militaires le sens de cantonnement. Les régiments prenaient leurs quartiers d'hiver, le commandement se réunissait au quartier général, les permissionnaires recevaient quartier libre, autrement dit, avaient le droit de passer le corps de garde.


Battre en brèche

À coups de canon 
Dans une guerre de siège, les artilleurs avaient la mission de battre, c'est-à-dire de tirer en pointant leurs batteries de canon sur le même point faible des remparts pour y ouvrir une brèche. 
Aux fantassins alors de monter sur la brèche et d'y livrer bataille pour rentrer dans la ville.


Battre la breloque

Pour rompre les rangs 
Du réveil à l'extinction des feux, la vie du soldat est rythmée par le tambour et le clairon. La breloque, batterie de tambour au rythme irrégulier, appelait à rompre les rangs pour une distribution de vivres. Elle provoquait la débandade de la troupe, ce qui a donné son sens à l'expression : fonctionner de manière désordonnée, cafouiller. 
Le nom de cette batterie de tambour qui devait être jouée à bâtons rompus tire son nom du tintement irrégulier que font les petits bijoux, les breloques, accrochés à un bracelet ou portés en sautoir.


Battre la chamade

Sueurs froides ou bouffées de chaleur, tremblements, mains moites, visage blême, autant de signes révélateurs qu'une crainte, qu'une angoisse ou une émotion nous étreint. Notre coeur se met alors à battre la chamade, tambourinant dans notre poitrine.
À l'origine, battre la chamade était une locution militaire désignant un signal donné par un tambour ou une trompette pour avertir que l'on souhaitait soit s'entretenir avec l'ennemi, soit se rendre.
Après un combat, l'ordre était aussi donné de battre la chamade afin d'obtenir une trêve pendant laquelle les deux camps s'autorisaient à ramener leurs morts vers leurs propres lignes.
Ces roulements de tambour ou coups de clairon étaient parfois mal interprétés ou étouffés sous la mitraille. Il s'ensuivait des bavures dramatiques et il fut décidé de doubler ces signaux sonores par un signal visuel, un drapeau blanc agité en signal de reddition ou demande de parlementer.
Tous les pays adoptèrent ce signal qui remplaça le battement de la chamade.


Biffin

Militaire de l'armée de terre 
Est biffin, à l'origine, le manieur de biffes, c'est-à-dire de chiffons. Avec son sac qui ressemblait à celui du chiffonnier, le fantassin semblait en effet tenir de lui ! On ne peut plus, à travers biffin, ne pas penser à l'anglais beef, qui en fait de la chair à canon. 
Quoi qu'il en soit, la définition de biffin que donnent en se jouant les militaires d'autres armes est celle d'un soldat qui n'a la chance d'appartenir ni à l'aviation, ni à la marine. 
L'aviateur n'échappe cependant pas à son surnom de branleur de manche, non plus que le marin à celui de mataf, voire, plus terre à terre, de chie-dans-l'eau, le pilote de l'aéronavale étant quant à lui un monte-en-l'air...

Bonnet de police

Coiffure d'infâme 
C'est que la tête du soldat s'est ornée tour à tour du shako (hongrois), du képi (allemand), du calot (d'ecclésiastique) et enfin du béret (basque). 
Le calot portait aussi le nom de bonnet de police
À l'origine, seuls les militaires purgeant une peine de salle de police étaient tenus de porter ce bonnet pour signaler leur état de puni.


C'est au poil

Parfait de précision 
Il s'en est fallu d'un cheveu ou à un poil près sont des métaphores de distances infimes. 
Au poil a pris le sens de perfection, de précision, grâce aux pilotes de la guerre de 14-18, qui savaient atterrir au poil sur des terrains de fortune.


C'est la Bérézina !

Cette expression fait référence à la retraite de Russie et au passage de la rivière Bérézina, du 27 au 29 novembre 1812, consacrant l'erreur commise par Napoléon Ier de s'être attaqué à l'ours russe. Le tsar Alexandre n'observant pas le blocus continental, Napoléon conçut le projet insensé d'envahir et de conquérir la Russie avec une armée de plus de 600 000 hommes, composée, entre autres, d'un tiers de Français, d'un tiers d'Allemands et de plus d'une centaine de Polonais. Après la bataille de la Moskova, il marcha sur Moscou incendiée par les Russes et dut faire retraite devant la politique de la terre brûlée décidée par l'ennemi.
La retraite commença en octobre et se solda par une gigantesque catastrophe : 400 000 morts et 100 000 prisonniers. La fatigue, le froid, la faim et les cosaques eurent raison de la Grande Armée.
Toute la nuit du 25 novembre, à la lueur des torches, les soldats du Génie, les pontoniers du général Eblé, travaillant dans l'eau glacée, réussirent à construire deux ponts sur la Bérézina ; l'un pour les débris de ce qui fut la Grande Armée, l'autre, plus étroit, pour les canons, chariots et matériel. Le maréchal Oudinot passa le premier avec la Garde impériale.
Napoléon traversa à son tour, rentrant à Paris en toute hâte pour enrôler des troupes fraîches. Les uns après les autres, des milliers d'hommes se concentrèrent vers ces deux derniers espoirs de fuir les poursuivants. Ney, en arrière-garde, tentait de contenir les cosaques, pendant que Victor, avec 9000 hommes aidés de la région polonaise de Dabrowski, faisait face à 40 000 soldats ennemis sur la rive russe. Le 29, Eblé donna l'ordre de détruire les deux ponts, derniers espoirs pour des milliers de traînards qui finirent gelés ou noyés dans cette rivière tristement célèbre. 25 000 morts en trois jours, voilà ce que fut la Bérézina.

Ça tombe comme à Gravelotte

Ces mots sont généralement utilisés, au temps présent, pour parler d'une pluie forte et drue. Au temps passé, l'expression désigne, lors d'un combat, l'importance des pertes en vies humaines. Lorsque les 7 et 8 février 1807, Napoléon Ier remporta contre les Russes et les Prussiens la célèbre mais oh ! combien sanglante victoire d'Eylau, il déclara en substance que si les rois pouvaient voir un tel carnage, il seraient à jamais dégoûtés de faire la guerre.
Napoléon III aurait pu se remémorer les mots de son ancêtre, au terme de la bataille de Gravelotte-Rezonville, le 16 août 1870, au sud-ouest de la ville de Metz.
L'armée du Rhin, sous les ordres du maréchal Bazaine, opposée à l'armée prussienne d'août à octobre 1870, dut se replier sur Metz sans essayer de faire la jonction avec l'armée de Châlons commandée par Mac-Mahon ; ce qui sera reproché au maréchal.
Pourtant ce dernier s'était maintes fois illustré dès la guerre de Crimée, à la prise de Sébastopol ; puis pendant la campagne d'Italie, à Solférino en 1859. La capitulation de Metz après quelques semaines de siège, le 27 octobre 1870, mit un terme à une effroyable boucherie qui avait commencé à Gravelotte-Rezonville le 16 août. Les rangs ennemis se trouvant sans cesse renforcés, le combat ne finit qu'avec le jour. L'armée française était parvenue à maintenir ses positions, mais à quel prix ! Les pertes étaient énormes.