Casser du sucre sur le dos de quelqu'un

Dire tout le mal possible en son absence 
Cette expression d'allure baroque, toujours en usage, évoque aujourd'hui, des pains de sucre que l'on devait jadis réellement briser au marteau avant de mettre les morceaux de sucre dans sa tasse. Elle est en fait composée de deux locutions associées bout à bout : casser du sucre, dire des ragots, et sur le dos, sur le compte, au sens où l'on met une action sur le dos d'une personne, on lui en fait porter la responsabilité. 
L'idée de casser du sucre pour dire du mal, remonte au moins aux premières années du XIXe siècle. Pourquoi cette image ? Étant donné l'extrême rareté du sucre, produit de luxe, sur les tables populaires, il est peu probable qu'elle soit née dans le langage des bas quartiers, ce qui exclurait l'interprétation de casser par manger, son sens argotique ancien qui est demeuré dans casser le morceau (dénoncer).
En revanche, on trouve au XVIIIe siècle : se sucrer de quelqu'un pour prendre pour un imbécile, que rapporte la langue de bonne tenue du Dictionnaire de Trévoux de 1752 et 1771). On peut rapprocher cette idée de la vieille locution casser du grès à quelqu'un : le considérer comme négligeable.
Il est possible encore que les deux expressions se soient croisées en chemin, il est possible aussi qu'une image ait engendré l'autre, car si l'on veut se sucrer, il faut bien casser du sucre. Ce qui est certain, c'est que l'expression est relevée par Delvau en 1867, comme appartenant au langage des coulisses : « Casser du sucre, faire des cancans - dans l'argot des cabotins ».
Dans le même temps, elle était employée dans le monde des voleurs au sens de dénoncer, peut-être sous l'influence de casser le morceau. C'est à peu près à la même époque que s'est ajoutée la précision sur le dos (1868 selon Wartburg).
L'idée de dénonciation demeure associée à celle de médisance dans les rapports des recrues des régiments disciplinaires d'Afrique de la fin du XIXe siècle. L'expression s'est largement étendue dans l'usage familier pendant la première moitié du XXe siècle, souvent teintée d'une nuance de rancune, voire de lâche vengeance...


Danser devant le buffet

Danser la fringale 
Quand on a vraiment la fringale, pourquoi se mettre à danser devant le buffet au lieu de s'en mettre plein le buffet (dans l'estomac) ? 
Danser n'a jamais voulu dire avoir faim. Il s'agit en fait d'un calembour. Fringaler de l'ancien français fringuer (sauter), voulait dire danser. De ce verbe dérive aussi l'adjectif fringant et nos fringues
À noter aussi que danser devant le buffet se dit la sauter, ce qui pimente encore l'expression !


Des nèfles !

Elles ne valaient pas un clou ! 
Des nèfles ! Rien du tout ! Cette formule énergique de refus à une demande date du XVIIe siècle. On la trouve déjà chez Oudin (1640) et, développée, chez Furetière : « On vous donnera des nèfles, vous n'obtiendrez rien. » 
L'emploi métaphorique du mot au sens de chose de peu de valeur date de Calvin, au XVIe siècle.


Du gros rouge qui tache

Du vin ordinaire 
Un coup de rouge désigne de même un verre de vin rouge (boire un coup) appelé dans la langue classique un rouge bord.

En faire tout un plat

On disait même plus au temps du bon roi Henri : faire trois plats de quelque chose, c'est-à-dire tout un repas à partir de trois mets sans intérêt.


Entre la poire et le fromage

Non, on ne finissait pas jadis un repas par du salé après des fruits ! Le sucré devait rester pour la bonne bouche
Ce dernier terme est suffisamment clair, d'ailleurs. Après les fruits était servi le dessert qui, comme son nom l'indique, était le dernier plat avant qu'on desserve. On sait aussi que le fromage tire son nom de la forme en osier dans laquelle il était mis à égoutter. Seule la fourme d'Ambert évoque encore cette opération, le fourmage, forme ancienne du mot. 
On sait moins que des formes du même type servaient aussi à confectionner outre le fromage de tête, nombre de desserts, mousses, crèmes et flans qui portaient le nom de fromages comme leurs homologues salés. Il était habituel, aussi, de les servir avec les fruits.
Par ailleurs, en 1640, date où est attestée l'expression, il n'était pas coutume de faire servir du fromage, ni à la fin ni au début d'un repas où on mettait les petits plats dans les grands. Le fromage était un coupe-faim pour une collation en milieu de journée.


Être chocolat

Berné comme un clown 
Le numéro des clowns Footit et Chocolat déclenchait des tempêtes de rires à chaque représentation du Nouveau Cirque dans les années 1895. Footit le clown blanc, ne cessait de berner son acolyte déguisé en nègre et s'exprimait à chaque fois « Il est chocolat !» Et son compère d'enchaîner : « Je suis chocolat ! » 
La phrase est restée. Confortée par l'expression des joueurs de bonneteau, faire chocolat. Parmi les spectateurs se trouvent toujours un compère que l'on fait gagner pour appâter le public. Chez les tricheurs, le chocolat était la poire, le pigeon qu'on allait plumer.


Être ni chair ni poisson

De religion douteuse 
La locution date de la guerre de religion. Celui qui ne mangeait que du poisson pendant le Carême était considéré comme un bon catholique, celui qui mangeait de la chair ne pouvait être que protestant. Et celui qui n'était ni chair ni poisson était un homme à la religion douteuse. 
Aujourd'hui, c'est l'homme indécis, indéfinissable.


Être tout sucre, tout miel

« La volupté est bien plus sucrée quand elle cuit », a dit Montaigne qui s'y connaissait ! Dès le début de son apparition, vers le XIe siècle, le sucre (dont le nom est venu par l'intermédiaire de l'arabe soukkar) a constamment été associé au comme symbole de douceur. Au XIIe siècle, l'Amour en usait comme d'un baume : « Mais de çon et de ses bresches (rayons de miel) li radoucit nouvelles amours », écrit Chrétien de Troyes.
Être tout sucre, tout miel s'est employé dès le XVIIe siècle, époque où la précieuse substance, loin d'être servie à discrétion sur les tables, était encore un produit rare que l'on ne trouvait guère que chez les apothicaires, et n'était quasiment délivré que sur ordonnance.



Être trempé comme une soupe

Au Moyen Âge, on ne faisait cuire son pain au four banal qu'une fois ou deux le mois. On mangeait alors le pain plus souvent rassis que frais. Ce qui permettait d'y tailler des tranchoirs qui servaient d'assiettes pour y couper sa viande ou y tailler des soupes, tranches de pain dur que chacun déposait au fond de son écuelle avant de verser le bouillon ou le vin chaud dessus. 
Cela s'appelait tremper sa soupe (du germain suppa, même sens, cf. l'anglais to sop, tremper). On n'imaginait pas alors manger une soupe non trempée !


Faire bonne chère

Faire bon visage 
Rien de tel qu'un ventre bien rempli pour faire bon visage. 
En ancien français, la chère était le visage, du latin cara. Faire bonne chère à quelqu'un était donc lui réserver un accueil souriant. Au XIXe siècle, le mot ne sera plus compris, et c'est alors que sous l'influence de la chair que l'on mange que son sens glissera vers celui de faire un bon repas.

Faire le poireau

L'expression est à rapprocher de rester en plan : c'est attendre debout, planté comme un poireau
Attendre interminablement se disait auparavant planter son poireau.


Faire ripaille

Comme un soldat 
La soldatesque en campagne était obligée de vivre sur l'habitant. Elle dormait dans les granges, troussait les filles et faisait ripaille, exigeant de se faire servir à manger. 
Ripaille dérive de l'ancien français riper, gratter dans le sens de gratter les plats.


Faire ses choux gras

Avec des petits morceaux de lard 
Les paysans au Moyen Âge mangeaient du chou presque à chaque repas. Seuls les plus riches pouvaient se permettre d'en rehausser le goût avec un bout de lard ou un morceau de petit salé. C'était ça, la recette du chou gras
Faire ses choux gras de quelque chose deviendra alors synonyme d'en tirer profit.


Finir dans les choux

Échouer sur toute la ligne 
En 1865, on disait être dans les choux
Les linguistes voient dans la locution un cas de paronymie (de quasi-homonymie) propre aux jeux de mots du langage populaire : Celui qui est dans les choux échoue !


Fourrer son grain de sel

Dans du sucré 
S'immiscer dans une conversation sans y avoir été convié dérange autant qu'un grain de sel le palais dans un plat sucré.

Hors-d'œuvre

Le vocabulaire théâtral du XVIIe siècle admettait le terme hors-d'œuvre dans une locution adverbiale, signifiant en intermède (1628), avant que de se cantonner au sens courant de mets servi au début d'un repas (1690), devenu à ce moment-là usuel et donnant lieu à des usages figurés ou métaphoriques.
Cela dit, le mot hors-d'œuvre apparaît vers la fin du XIVe siècle, d'abord attesté comme adjectif avec le sens ancien d'incapable d'agir, d'accomplir une œuvre, puis, techniquement, non travaillé, en parlant de pierres précieuses (1545), par opposition à en œuvre (pour parler d'une action qui aboutit).


Il n'y en a pas plus que du beurre en branche

C'est en broche qu'il faut comprendre l'expression. 
Henri Barbusse, le célèbre écrivain pacifiste, nous le confirme dans son roman Le Feu, sur la guerre de 14. Il écrivait alors : « Quand au fromgi, macache, et pas pu d' confiture que d' beurre en broche. » 
La broche en question n'est pourtant pas celle du rôtisseur, mais celle de l'apiculteur. Le mot broche désigne le rayon gorgé de miel au sortir de la ruche. Un vrai délice !


Le café du pauvre

Érotique en diable 
Il fut un temps où le café était un article de luxe que bien peu de gens pouvaient s'offrir après le repas. À défaut de café restait la partie de jambes en l'air avant la sieste. C'était cela le café du pauvre !


Les quatre mendiants

Fruits secs de la dévotion 
Les mendiants étaient un dessert servi pendant les quarante jours du Carême avant l'invention des transports par avion ou de la chaîne du froid qui permirent de manger des fruits frais en toute saison. 
On trouve encore des mendiants sous cellophane chez les épiciers. Un mélange de fruits secs : figues, amandes, noisettes et raisins secs dont la couleur évoquait la robe des moines mendiants. Les figues sont grises comme la robe des franciscains, les amandes blanches comme celle des dominicains, les noisettes sont brunes comme celles des carmes et les raisins violets comme le froc des augustins.
Ces quatre ordres de moines mendiants qui vivaient exclusivement d'aumônes avaient été créés au XIIe siècle pour lutter contre l'embourgeoisement du clergé.
Notons qu'au XVIIe siècle avoir les quatre mendiants présentait un tout autre sens : c'était à la fois avoir des poux, des puces, des punaises et des morpions !!!


Maître queux

On croit donc communément que c'est là la cause de cette appellation flatteuse, orthographe mise à part : le maître des queues. Eh bien, non ! 
Queux est l'ancien nom désignant le cuisinier, dérivé tout droit du latin coquus, de coquere (cuire). Il est de la même famille que coq, non pas la volaille mais le cuisinier sur un navire. Le maître queux est donc celui qui, selon l'ancienne législation, avait fourni la preuve de sa maîtrise et acquis le droit de s'installer, comme n'importe quel maître maçon ou maître menuisier. 
Le mot a déjà vieilli au XVIIe siècle et avait pris le caractère d'une spécialité : « Il n'est plus en usage que dans la Maison du Roi où il y a sur l'état des Maîtres queux dont la fonction particulière est de faire les ragoûts, entrées et entremets ; de même qu'il appartient aux Potagers de faire les potages, aux Hâteurs de fournir les rôts, aux Patissiers la pâtisserie, etc. », écrit Furetière. N'importe qui ne touchait pas à n'importe quoi dans les royales cuisines !
Il a existé jusqu'à la Révolution un Grand Queux de France, officier de la maison du roi, qui commandait à tous les officiers de bouche.



Manger à la même écuelle

Rien de plus normal 
Au Moyen Âge, même à la table des princes, les convives ne trouvaient sur la nappe devant eux ni assiette ni verre. Pour la viande, seulement un pain tranchoir, pain non levé sur lequel on pouvait la découper. Pour le potage, une écuelle pour deux à partager avec le voisin de table. Et un seul hanap pour toute la tablée. On y buvait à tour de rôle.


Manger le morceau

En se mettant à table 
Le détenu qui dénonçait ses complices avait le droit de rompre le jeûne du cachot en cassant le morceau
Aujourd'hui, on promet aux mouchards qui se mettent à table une remise de peine ou l'indulgence du juge. Mais la loi du milieu fait que beaucoup ne mangent pas de ce pain-là.

Mettre en capilotade

L'expression sort directement des fourneaux. 
« Une capilotade est une sausse qu'on fait à des restes de volailles & de pièces dépecées », Furetière. Le mot a été emprunté au XVIe siècle à l'espagnol capirotada, ragoût fait avec des œufs, du lait & d'autres ingrédients. 
Dans sa jeunesse, Gargantua déjeunait dès le matin « pour abattre la rozée et maulvais air : belles tripes frites, belles carbonnades, beaux jambons, belles cabirotades et force souppes de prime. » 
En 1626, Charles Sorel emploie déjà l'expression dans son sens agressif actuel : « Comment, coquins, estes-vous bien si osez que vous battre devant moy ?... Si j'entre en furei, je vous mettray tous deux en capilotade. »


Mettre la table

Monter les tréteaux 
L'épaisseur des murs des châteaux féodaux était telle que la place y était chichement comptée. Une table en bois massif avec des pieds pour le repas du seigneur, de sa nombreuse famille, et des hôtes de passage aurait été trop encombrante. 
Des tréteaux et des planches (tabulae en latin) suffisaient d'autant que, souvent, les banquets étaient servis à l'extérieur. On disait alors mettre les tables.



Mettre le couvert

Pour se mettre à couvert 
Dans les grands restaurants, le maître d'hôtel apporte à chaque convive sa commande dans une grande assiette surmontée d'une cloche en métal argenté. Indispensable mise en scène imposée par la nouvelle cuisine pour ménager la surprise de la présentation (et avant tout pour tenir le plat au chaud depuis les cuisines). 
Au temps des rois, on faisait de même, mais c'était surtout dans le but de mettre le monarque à couvert, le protéger du poison. Les plats étaient toujours servis à couvert et, après avoir été goûtés sur la crédence par l'officier de bouche. Par extension, on donnera le nom de couvert aux ustensiles placés sur la table devant chaque convive.


Mi-figue, mi-raisin

Comme en période de carême 
Mi-figue, mi-raisin ne satisfait ni les amateurs de raisins secs ni les amateurs de figues. 
C'est le sens de la formule depuis le XVe siècle : ni bien ni mal. 
Les raisins de Corinthe et les figues, comme tous les fruits secs, étaient des desserts de carême. En mars, il n'y avait pas de fruits frais.


Ne pas en ficher une datte

Pour gagner des nèfles 
Être payé des dattes, c'est ne rien gagner, gagner des nèfles ou des prunes. 
Bien qu'exotiques et coûteuses, les dattes s'inscrivent dans la lignée des petits fruits exprimant une valeur nulle. Sans doute sous l'influence de que dalle.


On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs

On ne fait pas d'omelette sans casser des œufs est une locution proverbiale pour dire qu'on n'obtient rien sans un minimum de sacrifices inévitables (milieu du XIXe siècle).
Cet adage culinaire puise dans la structure sémantique du lexique une raison pour justifier les abus et les crimes... Il revient à affirmer, par exemple, que le sens d'un mot comme révolution contient injustice, abus, crime, de même que omelette est défini par œufs cassés... Ce pessimisme éthique se fonde en logique, donc.


On s' fait une bouffe ?

Qu'on le veuille ou non, le verbe bouffer est devenu dans le langage familier quotidien le synonyme usuel de manger. 
Il est en train de perdre totalement dans les jeunes générations le côté légèrement agressif qu'il avait conservé chez ceux qui l'employaient il y a quelques années avec une pointe de provocation. Il s'entend aujourd'hui de façon tout à fait naturelle, et ne choque plus grand monde.
En 1973, le film de Marco Ferreri, La Grande Bouffe (dialogues de Francis Blanche) a sans doute beaucoup aidé à cette banalisation du mot chez les adultes, alors que manger tend à devenir un terme plus général et en quelque sorte plus abstrait.
Bouffer supplante peu à peu dans l'usage courant des verbes tels que déjeuner, dîner, souper, peut-être aussi parce que les repas en question, outre qu'ils se réfèrent à une organisation familiale souvent mal supportée par les jeunes, ne se distinguent plus pour beaucoup de gens par un caractère bien défini, et n'ont plus un horaire très strict. On bouffe à n'importe quelle heure, c'est ça la liberté ! On bouffe n'importe quoi, aussi... On se fait même des petites bouffes, gentiment, entre soi, pour le plaisir.
Le mot a d'abord voulu dire, dès le XIIe siècle, souffler en gonflant les joues. De là son développement d'une part en gonfler - un tissu bouffant ou un visage bouffi - d'autre part en expression de la colère ou de la mauvaise humeur, sens que son homologue occitan bufar (souffler) a toujours conservé : parce qu'un homme contrarié souffle bruyamment, comme un taureau prêt à charger. 
Le sens de manger gloutonnement est attesté indirectement dès le XVIe siècle par bouffeur et plus tard par bouffard (Bloch & Wartburg), ce qui rend inexacte la remarque de Littré : « Le langage populaire confond bouffer avec bâfrer. » Il ne confond rien, mais il est possible qu'il y ait eu à l'origine une attraction entre les deux mots, la forme ancienne de bâfrer étant baufrer. « Et après, grande chère à force vinaigre. Au diable l'ung, qui se faignoit ! C'estoit triumphe de les veoir bauffrer », Rabelais
Cela dit, la constatation de Littré doit avoir du vrai pour le passage de souffler à manger gloutonnement : « Il bouffe bien ; sans doute à cause de la rondeur des joueurs, quand la bouche est pleine. Mais ce n'en est pas moins une locution rejetée par le bon usage », ajoutait-il prudemment.
Les usages changent. Bouffer, manger ? Peu importe ! Manger vient lui-même d'une plaisanterie en latin : manducare qui voulait dire jouer des mandibules. L'essentiel, n'est-ce pas, est d'avoir quelque chose à se mettre sous la dent !


Partir comme des petits pains

Produit d'une célèbre multiplication 
L'expression est apparue au siècle dernier aux mêmes dates que le terme de multiplication des pains à laquelle elle fait allusion. 
Un des plus célèbres miracles du Christ qui prêchait au bord du lac de Galilée : cinq mille personnes et enfants étaient venus l'entendre. Jésus réussit à les nourrir avec seulement cinq pains et deux poissons.


Passez muscade

Le tour est joué 
L'expression est empruntée aux escamoteurs qui s'exclament passez muscade ! quand, dans un de leurs tours de passe-passe, ils font disparaître sous leurs gobelets une petite boule. Les bateleurs des champs de foire de jadis utilisaient des noix de muscade.


S'en soucier comme d'une guigne

Comme d'une cerise 
Guigne est ici une cerise, d'où l'expression voisine avoir la cerise, pour ne pas avoir de chance. 
L'homonymie avec la guigne de l'expression porter la guigne a donné naissance à une tradition pittoresque chez les jeunes conscrits du XIXe siècle : celui qui tirait le mauvais numéro et devait partir pour sept ans au service militaire se voyait offrir un bouquet de guignes par ses camarades plus heureux. Ce bouquet de guignes séchées était conservé pieusement dans un globe en verre sur la cheminée, à côté de celui du bouquet de la mariée...


Tirer les marrons du feu

Être marron comme le dindon de la fable 
La Fontaine serait stupéfait de constater l'inculture de nos contemporains : tirer les marrons du feu n'est pas réaliser une bonne affaire au détriment des autres. C'est tout le contraire ! 
Dans Le Singe et le Chat, c'est le chat Raton le dindon de la fable. C'est lui qui est marron, c'est lui seul qui se brûle pour retirer les marrons du feu... au seul profit du singe Bertrand qui lui, les croque !

Tourner autour du pot

L'expression qui signifie hésiter, tergiverser (avant d'aborder un sujet, avant de dire quelque chose) est apparue au milieu du XVe siècle (Chastellain), sous diverses formes telles que :
- aller entour le pot ;
- aller autour du pot ;
- aller alentour du pot.
L'expression n'est en fait attestée qu'au XIXe siècle dans un emploi concret (Littré), mais doit cependant faire allusion à la marmite, l'idée de base étant ne pas oser demander ce qu'il y a à manger !


Un petit-suisse

Un fromage... normand ! 
En 1850, Charles Gervais, commis d'un mandataire aux halles, goûte un petit fromage frais délicieux qui vient de Normandie. Il se précipite aussitôt en diligence au marché de Villers-sur-Auchy et, sur place, rencontre une fermière, Mme Héroud, qui lui confie un secret : un mélange de crème fraîche et de lait avant que ce dernier ne soit caillé, recette d'un vacher suisse du canton de Vaud venu travailler dans sa ferme. 
Il ne restait plus qu'à Charles Gervais qu'à convertir les Parisiens à ce petit-suisse de Normandie.


Un vrai cordon bleu

Comme un chevalier du Saint-Esprit 
L'Ordre du Saint-Esprit dont la croix d'or à huit pointes était portée en sautoir suspendue à un cordon bleu fut créé en 1578 par Henri III pour récompenser les chefs des catholiques, pour leurs hauts faits contre les protestants. 
Cet ordre sera jusqu'à la Révolution la distinction la plus convoitée par les nobles de la cour. 
Cordon bleu deviendra sous Louis XV synonyme d'excellence, jusque dans le domaine culinaire, par référence aux déjeuners célèbres qui réunissaient périodiquement un groupe de gourmets, tous chevaliers du Saint-Esprit. On disait alors faire un repas de cordons bleus. L'Ordre fut aboli à la Révolution. Ces festins tombèrent dans l'oubli.
L'expression sera alors interprétée comme le cordon du tablier bleu des cuisinières des maisons bourgeoises réputées pour leur table.


Une bonne poire

Facile à cueillir 
Allusion à la mollesse du fruit qui, une fois mûr, tombe tout seul de l'arbre, une bonne poire est facile à duper, tout comme une bonne pomme. 
Attendre le moment favorable se disait aussi laisser mûrir la poire.