Tissu ou jeu de cartes ?
Deux hypothèses s'affrontent. On a avancé que ce mystérieux trente et un était le trentain, tissu coûteux dont la trame était constituée de trente centaines de fils. Mais le mot trentain a cessé d'être employé à partir du XVe siècle alors que l'expression n'est attestée que trois siècles plus tard, en 1833, dans le langage des casernes ; ce qui jette un doute sur cette étymologie traditionnelle ! Et dans cette hypothèse, pourquoi se mettre sur ? Deuxième hypothèse : le mot trente et un serait synonyme de perfection car c'est le total à atteindre pour être sûr de gagner au jeu du même nom, un jeu de cartes très en vogue au début du XIXe siècle, qui ressemblait au baccara. Là, les dates coïncident mieux. Mais encore une fois, pourquoi se mettre sur ?
L'explication pourrait venir d'une expression en usage au XVIIe siècle, se mettre sur le bon bout, qui avait exactement le même sens, c'est-à-dire se parer, se bien vestir. Dans le but de pouvoir tenir son rang et figurer sur le bon bout de la table quand on était invité chez un riche seigneur. Cela rejoint ici la notion de perfection du jeu de cartes. C'était déchoir que se retrouver sur le bas bout, où se tenaient les gens de qualité inférieure. Ainsi serait né se mettre sur son trente et un ou même son trente deux qui se trouve attesté en 1834.
Mais l'origine de l'expression reste incertaine, et la plus vraisemblable serait encore celle fournie par Claude Duneton dans La Puce à l'Oreille. Il s'agirait du 31 du mois qui n'arrive que sept fois par an. Selon Duneton, en Prusse, au XIXe siècle, les troupiers recevaient un supplément d'entretien pour terminer le mois.
Ce qui aurait été l'occasion d'organiser, tous les 31, quelques préparatifs particuliers en caserne ou quelques revues de détails au cours desquelles les soldats prussiens devaient astiquer, briquer, faire reluire, gratter, récurer, repasser tout leur fourniment, afin de paraître sous leur plus bel aspect, d'où l'expression se mettre sur son trente et un.